Épicentre du nouveau coronavirus, l’Amérique latine doit aussi lutter contre la pandémie de corruption.

Au temps de la Covid-19, l’état d’urgence sanitaire décrété un peu partout à travers l’Amérique latine a provoqué des cas de corruption en cascade témoignant de la bonne santé des pratiques illégales qu’aucun vaccin jusqu’ici ne parvient à éradiquer.
Au cours des quatre derniers mois, le Brésil, la Bolivie, la Colombie, l’Équateur, le Guatemala, le Mexique, le Pérou et la République dominicaine, entre autres, ont essuyé des scandales de corruption tous liés au coronavirus, à savoir distribution irrégulière de l’aide, achats surévalués, manque de transparence dans les attributions de marché, etc.
En Haïti, si aucun cas de corruption avérée n’a été dévoilé pour le moment, le besoin de transparence, d’efficience dans les dépenses publiques ne s’est jamais autant fait sentir que dans ce contexte de Covid-19 où l’administration Moïse/Jouthe, pour avoir les coudées franches afin d’engager des fonds de plusieurs milliards de gourdes dans la lutte contre la pandémie, a déclaré, puis renouvelé, l’état d’urgence sanitaire.
Le projet de contrat relatif à l’acquisition d´équipements hospitaliers de la compagnie Bowang Co.Ltd/ChinaXu Xia pour un montant de 18 millions de dollars américains, n´ayant pas été soumis à la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (CSC/CA) en vue d´obtenir son avis motivé,constitue non seulement une violation flagrante de l´article 200-4 de la Constitution mais également un mépris des attribution de la CSCCA . L´exécution de ce contrat est une douloureuse piqûre de rappel aux activistes de bonne gouvernance qui dénoncent les mauvais usages, vols, détournements et gaspillages enregistrés dans la gestion du fond PetroCaribe.
Autant le gouvernement, pour financer sa réponse contre la pandémie de coronavirus, est appelé à mobiliser des ressources conséquentes ; autant il doit faire preuve de transparence dans ses dépenses en rendant publics tous les marchés passés, entre autres .La commission nationale des marchés publics, en tant qu´organe de la Primature doit nous éclairer là dessus. Convaincre nos dirigeants qu’état d’urgence ne rime pas avec signature de contrats de gré à gré peut s’avérer sans doute plus ardu que trouver un traitement à la pandémie.
En attendant, faisons un retour sur certains cas de corruption ayant secoué la région depuis l’apparition du coronavirus.
Bolivie
Ce petit pays d’Amérique du Sud a sans doute enregistré un de ses plus grands cas de corruption qui a envoyé derrière les barreaux le ministre de la Santé, Marcelo Navajas et plusieurs responsables dont le consul bolivien à Barcelone, après l’ouverture d’une enquête judiciaire pour surfacturation présumée d’environ deux millions de dollars concernant l’achat en Espagne de respirateurs pour des patients atteints de Covid-19.
Brésil
Deuxième pays au monde avec le plus grand nombre d’infections et de décès liés au Covid-19, le géant sud-américain n’échappe pas à la pandémie de corruption. Les irrégularités dans la gestion des fonds publics pour lutter contre le coronavirus se sont aggravées, entraînant l’arrestation de dizaines de personnes à travers le pays.
Équateur
A Guayaquil, deuxième ville du pays, les housses mortuaires sont passées de 12 à 144 dollars pour ce qui n’est qu’un échantillon de délit présumé de surfacturation. En effet, le parquet équatorien conduit des enquêtes sur 63 cas de corruption et a effectué des descentes dans 27 villes dans le cadre de ces enquêtes.
Colombie
Après l´enregistrement de plusieurs cas de détournement de fonds, un front commun sans précédent a été constitué entre plusieurs agences de contrôle pour protéger les ressources destinées à faire face aux effets de la pandémie et éviter la surfacturation dans les contrats signés pour venir en aide à la population vulnérable.
Pérou
Les cas de corruption y sont courants depuis le commencement de la crise au début du mois de mars. Début de juin, le parquet anticorruption a identifié 653 actes présumés illégaux commis par des autorités publiques pendant la pandémie. Le cas le plus significatif a été le scandale de l’achat de matériel de protection défectueux au sein de la police nationale. Ce qui a coûté son poste au ministre de l’Intérieur et occasionné le congédiement de tout le haut commandement des corps de sécurité.
Guatemala
Ce scénario s’est également produit au Guatemala où le sous-ministre de la Santé, Rodolfo Galdámez, licencié le 20 avril dernier, fait l’objet d’une enquête pour avoir été à la fois fonctionnaire et fournisseur de services au gouvernement.
Ces différents cas de figure montrent comment, dans la crise actuelle, au moment où les gouvernements consentent des dépenses publiques extraordinaires, des groupes ayant accès à des informations privilégiées qu´ils utilisent de manière illicite pour réaliser des bénéfices et s´enrichissement au détriment de la population en général. En guise de réponse, les Nations Unies ont créé un Observatoire régional des prix des médicaments en Amérique latine pour éviter les irrégularités dans l’achat de médicaments et de fournitures médicales pendant la pandémie.
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