Éditorial

La spirale de la dette publique haïtienne

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La politique d’endettement constitue un levier qu’utilise intelligemment la plupart des dirigeants pour le développement économique de leur pays. En Haïti au contraire, elle est un boulet pesant intimement liée à notre situation de sous-développement. D’aussi loin qu’on puisse remonter dans l’histoire économique de ce pays, l’endettement n’a jamais servi une cause nationale ni aidé la grande majorité à améliorer ses conditions d’existence. À ce propos, la dette de l’Indépendance de 1825 peut être considérée comme le péché originel, le sésame qui a ouvert la boîte de Pandore des gabegies, des emprunts douteux et de la mauvaise gestion du service de la dette qui étaient monnaie courante tout le long du 19ème siècle haïtien.

Le scandale de la Consolidation, ayant enclenché le fameux procès du même nom à la fin du 19ème et au début du 20ème siècle, était considéré comme le point culminant de la corruption par les historiens de l’époque. On connait tous la suite : trois des condamnés, par contumace, deviendront président de la République d’Haïti, consacrant ainsi le règne de l’impunité tout en donnant une fin de non-recevoir à une quelconque velléité de reddition de compte. Et le président Nord Alexis subira les pires railleries pour avoir osé défier l’ordre établi en initiant ce procès contre la corruption et la malversation.

L’exploit du président Estimé, à savoir le remboursement total de la dette externe d’Haïti vers la moitié du siècle passé, n’aura été donc qu’une éclipse. Ses successeurs n’ont pas tardé à remettre le couvert en endettant le pays sans que la croissance et le développement ne soient au rendez-vous. L’affaire PetroCaribe, dont le dénouement demeure à ce jour incertain, est sans nul doute la parfaite illustration de cette situation séculaire. Ce n’est pas tant la dette envers le Venezuela qui est remise en cause mais plutôt l’utilité de cette créance.

Si nous pouvons présumer de la bonne foi des signataires de cet accord, la gestion qu’en ont fait les ordonnateurs de ces fonds est jugée scandaleuse et soulève de graves suspicions voire des accusations de corruption et de détournements de fonds. Alors que tous les indicateurs macroéconomiques sont au rouge, nos dirigeants brûlent la chandelle par les deux bouts en faisant exploser la dette interne. À ce stade, la question n’est pas de savoir si le service de la dette représentera le poste de dépenses le plus important du budget national mais quand cela arrivera. Aussi est-il tout à fait légitime de se demander jusqu’à quand nos décideurs politiques continueront-ils de compromettre la capacité de développement national en rendant insoutenable la dette tout en hypothéquant l’avenir des générations futures ?

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