Quel budget pour redresser la trajectoire économique du pays ?

L’exercice fiscal 2020-2021 touche à sa fin. Il aura été particulièrement riche en événements politiques. Le 7 février 2021 marquait, selon des membres de l’opposition, la date de fin de mandat du président de la République, ce qui a causé de sérieux troubles politiques au début de l’année en cours.
Le 7 juillet 2021, date de l’assassinat tragique du Président de la République, Jovenel Moïse, à son domicile, portait à son paroxysme la détérioration de situation politique dans le pays. Ceci a contribué à l’émergence de fortes anticipations négatives au niveau de l’économie haïtienne, affectant ainsi l’évolution du produit intérieur brut (PIB), des prix des biens et services et du taux de change du dollar américain par rapport à la gourde haïtienne.
Selon des prévisions récentes de la Commission économique pour l’Amérique latine et la Caraïbe (CEPAL), avant l’assassinat du président, le taux de croissance du PIB pour l’exercice fiscal 2020-2021 serait de seulement 0.1% contre 2.4% prévu en début d’exercice par le gouvernement.
En outre, il ne faudrait pas écarter l’émergence de fortes pressions inflationnistes, au cours des prochains mois, dans l’économie haïtienne. Les principaux partenaires commerciaux d’Haïti, les États-Unis et la République dominicaine, ont vu leur taux d’inflation se rapprocher récemment du niveau de 5%. Le taux d’inflation, calculé en rythme annuel, était passé en Haïti à moins de 20% après la forte appréciation de la gourde par rapport au dollar américain. Il pourrait revenir toutefois au-dessus de la barre psychologique de 20% atteint durant la période de la crise politique en 2019.
Le nouveau gouvernement hérite d’une situation financière très difficile résultant de la combinaison des crises politique et sanitaire ayant placé le pays sur une trajectoire de contraction économique. Que faire pour renverser la tendance? La faiblesse des ressources domestiques parallèlement à des dépenses publiques soutenues a donné lieu à des déficits budgétaires record. La crise politique continue qui s’est empirée avec la mort du président a retardé le processus budgétaire pour l’exercice fiscal 2021-2022. Ce retard aura des répercussions négatives sur la planification budgétaire pour le prochain exercice qui débutera dans quelque deux mois. Un nouveau décret budgétaire, sans aucune participation des parties prenantes, sera adopté de façon exclusive par le gouvernement. À l’instar des trois derniers budgets nationaux ayant été établis, sans ratification parlementaire, ce qui est contraire aux prescrits constitutionnels.
Outre le non-respect constitutionnel, le décret budgétaire ne pourra pas répondre aux multiples défis que le nouveau gouvernement aura à affront- er. On pourrait citer la sécurité, l’éducation, la santé, la protection sociale, etc. Les maigres ressources de l’État haïtien, avec une pression fiscale de moins de 10%, sont allouées en grande partie aux dépenses de fonctionnement laissant une infime partie pour les besoins d’investissement nécessaires pour améliorer les conditions de vie de la population.
Les autorités financières auront besoin d’un important soutien international pour compenser la faiblesse des ressources locales en absence de la dette externe. En période de COVID-19, la communauté internationale pourrait se révéler moins solidaire. Concernant la dette publique, son service a connu une augmentation substantielle au cours de la dernière décennie hypothéquant l’avenir de la jeunesse.
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