N’oublions pas le Grand Sud!

Plus d’un mois après le tremblement de terre du 14 août 2021, l’élan de solidarité envers le Grand Sud, manifesté au lendemain du sinistre, est en train de s’estomper. Noyé dans le concert bruyant et assourdissant de l’actualité politique, dominée en grande partie par l’insécurité qui fait rage et l’incapacité des acteurs politiques à signer un accord de sortie de crise.
Le gouvernement ainsi que la communauté internationale semblent délaisser le chevet de la population du Grand Sud pour se consacrer à la mission quasi-impossible de mettre autour d’une même table les intérêts politiques divergents en vue d’adresser d’un commun accord les principaux défis auxquels fait face le pays, à savoir mettre fin à l’instabilité politique, organiser les élections générales, etc.
Les sinistrés de la péninsule du Sud deviennent de plus en plus inaudibles. Les feux des projecteurs se retirent petit à petit sur les zones dévastées par le séisme. La phase de l’urgence étant arrivée à son terme, la couverture médiatique se fait de plus en plus rare. Très bientôt, les riverains des localités des trois départements touchés (Nippes, Sud et Grand’Anse) risquent d’être absents des débats. À moins qu’ils ne fassent pression sur qui de droit pour se faire entendre…
Les besoins, les revendications ne sont pas moins prioritaires. L’urgente nécessité d’un plan de relèvement, secteur par secteur, se fait de plus en plus sentir. À l’intérieur de ce numéro, nous publions un article qui dresse un état des lieux du secteur agricole sévèrement impacté par le séisme dans les trois départements susmentionnés. Ce travail de recensement est l’œuvre de AYITIKA, une entreprise «citoyenne» engagée dans le développement de la filière du cacao dans le Grand Sud.
Dans son rapport d’évaluation des dégâts, AYITIKA effectue également un ensemble de recommandations qui visent notamment la recapitalisation des exploitants agricoles. La démarche est d’autant plus pertinente qu’elle provient d’une entreprise locale connaissant assez bien le secteur agricole, ses besoins ainsi que ses défis. Nous encourageons vivement ce type d’entreprise. Il est extrêmement important que chaque acteur parle au nom du secteur dans lequel il évolue afin d’éviter toute cacophonie ou duplication et des solutions toutes faites.
Le plan de relèvement post-séisme du Grand Sud étant, à date, inconnu du grand public, impossible de dire avec exactitude quelle part y est consacré à l’accompagnement du secteur agricole. Nous ne manquerons pas de suivre avec grand intérêt ce dossier et de réclamer le cas échéant des mesures d’accompagnement pour les agriculteurs décapitalisés. L’agriculture reste et demeure un secteur d’activité économique pourvoyeur d’emplois apte à jouer un rôle important dans l’équilibre des prix sur le marché local et à faire pencher en notre faveur la balance des paiements.
Dans un autre domaine, le dernier lundi du mois de septembre, à l’occasion de la Journée mondiale du Tourisme, le Premier ministre, Ariel Henry, a présidé une cérémonie commémorative au cours de laquelle il a invité les acteurs du secteur à réfléchir et à œuvrer pour un tourisme durable en Haïti. Cette réflexion doit prendre en compte toute la chaîne de valeur et ne doit pas seulement se résumer à l’hébergement et aux offres de loisirs.
La situation délétère qui prévaut actuellement à travers le pays a mis à mort les activités touristiques, pour un long moment il nous semble. Ce qui nous laisse assez de temps pour cogiter sur comment nourrir chaque potentiel touriste de passage dans le pays dans une perspective d’autosuffisance alimentaire, et pour mettre en place les politiques publiques idoines et surtout consentir les investissements nécessaires. Un vaste chantier qui s’apparente aux douze travaux d’Hercule.
DevHaiti