Gouvernance

S.O.S régional contre les flux migratoires Haïtiens en direction des États-Unis

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Des milliers de migrants haïtiens en provenance d’Amérique du Sud, en quête d’opportunités, mettent le cap vers le nord vers les États-Unis, et environ 15 000 d’entre eux sont bloqués à la frontière américano-mexicaine et plusieurs milliers d’autres font face à de nombreux risques et à la mort lors de leur transit à travers le Darien Gap.

Les conditions précaires auxquelles ces migrants haïtiens sont confrontés lors de leur transit dans la région – en particulier dans le Darien Gap – les rendent vulnérables à divers risques de protection, notamment la violence sexiste, la traite des personnes, le trafic de migrants et d’autres formes d’abus et/ou de violence, y compris aux mains de réseaux criminels.

La plupart des migrants avaient quitté Haïti il y a de nombreuses années, certains d’entre eux il y a plus de 10 ans. Leur motivation à quitter le pays reposait sur diverses raisons, telles que le manque de revenus ou d’opportunités d’emploi, l’accès insuffisant aux services pour eux et leur famille, le tremblement de terre de 2010 et l’ouragan Matthew de 2016.

Après avoir parcouru des milliers de kilomètres dans des conditions infrahumaines, bravé moult dangers, et avoir été témoins de décès et victimes d’extorsions et de vols, ainsi que de violences physiques, les migrants haïtiens sont rapatriés en Haïti par les États-Unis d’Amérique, sans autre forme de procès et dans bien des cas en violation totale des conventions internationales sur la migration.

Pour la période allant du 19 septembre au 19 octobre 2021, l’Organisation internationale pour la migration (OIM) annonce avoir fourni un accueil et une assistance post-arrivée à un total de 10 831 migrants (6 586 hommes, 2 456 femmes, 920 garçons et 869 filles) de retour des États-Unis (73%), mais aussi du Mexique (2%), de Cuba (11%), et des Bahamas (10%).

Les États-Unis à eux seuls ont rapatrié en Haïti, sur cette période, un peu moins de 8000 migrants qui, pour la plupart, résidaient au Chili ou au Brésil avant de commencer leur voyage vers le nord, avec en leur compagnie plusieurs enfants rapatriés nés dans ces pays.

Selon l’OIM, 500 enfants environ déportés récemment en Haïti sont de nationalité étrangère, à savoir 404 chiliens, 84 brésiliens, 6 vénézuéliens, 1 panaméen, 1 hondurien, 1 dominicain et 1 nicaraguayen.

Les États-Unis appelés en renfort pour freiner la migration haïtienne

Principal pays de destination de la plupart des flux migratoires qui traversent plusieurs territoires d’Amérique du Sud et centrale, les États-Unis d’Amérique sont appelés à la rescousse par trois chefs d’État pour freiner la migration des Haïtiens à travers l’Amérique latine en direction de la frontière américaine.

Réunis dans le cadre de l’Alliance pour le développement en démocratie, à Panama City, le 20 octobre 2021, les présidents Carlos Alvarado du Costa Rica, Laurentino Cortizo Cohen du Panama et Luis Abinader Corona de la République dominicaine, ont appelé les États-Unis d’Amérique à prendre des« mesures concrètes » pour tacler l’augmentation des flux migratoires irréguliers, sans précédent dans les trois pays.

Les trois dirigeants ont insisté sur la nécessité d’impliquer les États-Unis et les Nations Unies dans le déploiement d’investissement en Haïti, en particulier dans les infrastructures publiques, qui pourrait générer des emplois et stimuler le développement économique dans un pays en proie à la pauvreté, la violence et les crises institutionnelles.

«Nous réitérons le besoin urgent d’une approche immédiate, dans le cadre d’une approche globale et avec la responsabilité partagée effective de tous les pays de la région des Amériques qui se sont constitués en route d’origine, de transit et de destination, alors que nos pays ne peuvent relever ce défi isolément, en sauvegardant les droits humains des migrants. Nous réaffirmons qu’il s’agit d’un problème régional qui nécessite une solution régionale», peut-on lire dans la déclaration commune publiée à l’issue de la rencontre à Panama City.

Un sommet ministériel régional sur la crise migratoire provoquée par le flux des migrants haïtiens notamment a eu lieu le même jour, à savoir le mercredi 20 octobre 2021, à Bogota en Colombie en présence du secrétaire d’État américain, Antony Blinken.

Profitant de la présence du secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, en visite en Colombie, le président Iván Duque a exhorté les organisations internationales   à   faire   une   intervention

«structurelle» en Haïti qui génère «espoirs et revenus» et à effectuer un recensement pour savoir combien de migrants il y a dans les pays américains.

«Aujourd’hui, nous avons besoin d’une action qui nous permette de générer de l’espoir et des revenus en Haïti, nous avons besoin d’une mobilisation industrielle et de reprendre le projet de parc industriel de Caracol, qui a été lancé il y a 10 ans. Si nous ne trouvons pas une solution qui donne une lueur d’espoir, nous aurons un phénomène plus important dans toute la région», a poursuivi le président colombien appelant des organisations telles que la Banque interaméricaine de développement, la Banque mondiale (BM) et la Banque de développement de l’Amérique latine (CAF) à faire une intervention «structurelle» en Haïti.

Le flux de migrants, principalement haïtiens, empruntant la route du Nord pour se rendre aux États-Unis d’Amérique en traversant une douzaine de pays de l’Amérique latine et centrale, a considérablement augmenté ces derniers mois. Plusieurs pays de la région, submergés par ce flux, dont la Colombie, se retrouvent dans l’incapacité de fournir une aide humanitaire et à l’entrée de ces migrants en provenance du Brésil et du Chili, pays vers lesquels ils ont migré après le tremblement de terre de 2010.

Ces dernières semaines, les États-Unis ont expulsé des milliers de migrants haïtiens qui attendaient à leur frontière sud avec le Mexique. Entre janvier et août de cette année, selon des données officielles, plus de 67 100 personnes ont traversé la dangereuse jungle de Darien, la frontière entre le Panama et la Colombie, se dirigeant vers le nord dans l’espoir d’atteindre l’eldorado américain.

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