Développement durable

Les résultats officiels de l’évaluation des dommages, pertes et besoins post-catastrophe pour le grand Sud

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Le lundi 23 août 2021, le Premier ministre Ariel Henry a procédé au lancement des travaux du comité de pilotage technique devant conduire l’exercice d’évaluation des dommages, pertes et besoins (PDNA) à la suite du passage du séisme du 14 août 2021 dans la péninsule sud d’Haïti. Trois mois plus tard, soit le mardi 23 novembre 2021, le chef du gouvernement a convié toutes les parties prenantes à la séance de présentation des résultats de l’exercice qui, aux dires de ce dernier, estiment à 157 milliards de gourdes les dommages et pertes, dont près de 50% seulement pour le secteur logement, alors que les besoins de relèvement se chiffrent à 2 milliards de gourdes.

Entre invitations, recommandations et exhortations, le Dr Ariel Henry a, en substance, rappelé à tous que «nous n’avons pas le droit à l’erreur si nous voulons éviter une double catastrophe dans la région». «Je vous exhorte à agir avec méthode, rigueur et pragmatisme […] Je recommande la concertation, la communication, le dialogue», a dicté le Premier ministre soulignant le besoin de la péninsule sud d’une nouvelle approche de gouvernance, d’institutions plus fortes, de développement plus résilient pour faire face aux chocs naturels et anthropiques répétitifs et trop souvent meurtriers et dévastateurs.

«J’invite tous les acteurs à faire corps derrière le plan de relèvement intégré de la péninsule sud comme document d’opérationnalisation du cadre de relèvement et de reconstruction», a poursuivi le Dr Henry avant d’exhorter les acteurs au respect de toutes les directives du PDNA, à savoir la bonne gouvernance, la relance économique, la résilience durable, les infrastructures, l’aménagement du territoire et les moyens de subsistance et enfin la protection et l’inclusion sociale.

Pour le titulaire du MPCE, le ministre Dieuseul Simon Desras, la péninsule sud désormais dotée d’un document de qualité, fiable et applicable qui s’aligne sur les grands chantiers de refondation de la nation auxquels on ne pourra pas se déroger.

«L’expérience de la péninsule sud devra servir de référence aux initiatives futures pour le reste du pays […] L’approche globale ainsi que les lignes directrices demeureront des points d’ancrage pour toutes initiatives similaires», a prescrit le ministre Desras se réjouissant du fait que le processus a été conduit dans les délais impartis.

Sous le leadership du MPCE, et avec l’appui des partenaires techniques et financiers, les représentants de divers secteurs ont effectué un travail méticuleux, très important pour les mois et les années à venir. À travers la voix de son ambassadeur, Sylvie Tabesse, l’Union européenne a exprimé sa satisfaction d’avoir pu accompagner Haïti avec la Banque mondiale, les Nations unies, et la BID dans cette première étape d’évaluation des besoins nécessaires à la reconstruction.

«Il ne s’agit pas simplement de reconstruire, mais de reconstruire mieux et de façon résiliente et plus équitable», a plaidé la diplomate européenne avant de faire mention de quelques principes directeurs que le cadre de relèvement intégré devrait, selon elle, intégrer. Il s’agit, tout d’abord, d’une bonne priorisation des besoins pour chaque secteur, et ensuite de l’appropriation du processus et de sa mise en œuvre par les ministères sectoriels, les services des départements et des communes.

À ce propos, le directeur général du MPCE, Wilfrid Trénard, s’est frotté les mains pour la méthodologie retenue dans le cadre de l’élaboration du PDNA qui, selon lui, est fondamentalement différente. «La spécificité de l’approche locale a prévalu afin de répondre aux vœux du ministre: un PDNA réaliste basé sur une stratégie réaliste assortie d’initiatives, de projets et de programmes réalistes», a souligné le DG Trénard.

«Le PDNA a démontré encore une fois l’impératif d’agir maintenant afin d’intégrer la gestion des risques dans la planification et la mise en œuvre des politiques publiques», a indiqué le coordonnateur résident du système des Nations unies en Haïti, Bruno Lemarquis, qui a réclamé, lors de son intervention, que la gestion des risques et désastres soit élevée au niveau de priorité nationale en Haïti.

Pour le coordinateur résident, les besoins restent immenses, certains plus urgents que d’autres, et il a ensuite insisté sur l’importance de travailler sur plusieurs  fronts  à  la  fois,  à  savoir  assistance humanitaire, relèvement immédiat et enclencher la reconstruction.

Cependant, a tôt fait de s’alarmer Bruno Lemarquis, l’assistance humanitaire est en train de s’épuiser par faute de financement et des interventions de relèvement tardent à se mettre en place de manière concrète en réponse aux besoins dans les zones dévastées par le séisme du 14 août dernier.

En tant qu’institution financière multinationale, la Banque mondiale propose de contribuer à la réponse des besoins s’élevant actuellement à 1,97 milliard USD, dont environ 600 millions USD sont des besoins de financement public, et d’allouer un montant total estimé à 190 millions USD dans le cadre du plan de relèvement intégré qui est actuellement en cours de finalisation.

«Pour la phase de relèvement et de reconstruction à moyen et long terme, la Banque mondiale va aussi mobiliser des fonds additionnels de l’IDA19 du guichet de réponse aux crises (Crisis Response Window) pour un montant estimé à 150 millions USD, dont 90 millions USD pour compléter les opérations en cours de préparation dans les domaines de la sécurité alimentaire, de l’éducation et du transport [60 millions USD seront utilisés pour le réapprovisionnement des CERC]. Ces nouvelles opérations devraient être approuvées avant la fin du premier trimestre 2022», a annoncé le chef des opérations de la Banque mondiale en Haïti, Laurent Msellati.

Informer l’auditoire de sa décision de faire de la péninsule sud une priorité de son gouvernement, le Premier ministre Ariel Henry a ensuite enjoint les ministères de la Planification et des Finances à sortir des sentiers battus pour donner du relief aux besoins des 3 départements de la péninsule sud dans le budget 21-22.

«Cette priorité doit être reflétée en tout premier lieu dans le programme d’investissement public 21-22 », a instruit le Dr Ariel Henry précisant que le cadre de relèvement et de reconstruction ainsi que le plan de relèvement intégré de la péninsule sud veut offrir aux acteurs un guide d’actions cohérent pour s’assurer la performance des interventions dans les zones les plus affectées.

Pour y parvenir, le directeur de mission de l’USAID en Haïti, Christopher Cushing, a fait part de son souhait d’apporter son soutien à la revitalisation du CAED (Cadre de coordination de l’aide externe au développement), sous une forme ou une autre. Le fonctionnaire américain estime qu’«avec un CAED actif pour notre mécanisme de coordination, nous pouvons renforcer le rôle haïtien en tant que moteur du développement et garantir que notre travail réponde aux besoins du peuple haïtien».

Au menu de l’agenda, au terme de la cérémonie officielle de lancement, l’assistance a pu suivre une présentation du processus d’élaboration du PDNA ainsi que des thématiques qui le constituent. Le cadre et le plan de relèvement de la péninsule sud ont ensuite été présentés. Peu avant la clôture, les événements préparatoires à la conférence des donateurs, prévue pour le 22 janvier 2022, ainsi que les principes de la conférence elle-même ont fait l’objet de débat

Selon le résumé exécutif du document d’Évaluation post-désastre en Haïti, les résultats de l’évaluation des effets du séisme du 14 août 2021 indiquent un montant total s’élevant à 1,620,071,414 de $US en termes de dommages et pertes . Ces effets sont répartis en 1,246,499,834 de $US en dommages (soit 77%), et en 373,571,580 de $US en pertes (soit 23%). Ce sont les secteurs sociaux – comprenant la santé, l’éducation et le logement –qui avec 82% du total ont enregistré le plus de dommages, suivis par les infrastructures avec 10%.

S’agissant du bilan humain direct du séisme, il s’élève dans les trois départements de la Péninsule Sud à 2,246 personnes décédées, 12,763 personnes blessées, et à 329 personnes disparues. Le bilan humain direct et indirect du séisme s’élève à un total de 666,561 personnes réparties selon les trois départements de la Péninsule Sud.

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