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COP 27: Haïti voit le verre à moitié vide…

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Un accord jugé décisif a été trouvé à la Conférence des Parties des Nations Unies sur les changements climatiques organisé du 6 au 19 novembre à Charm el-Cheikh en Egypte. Cet accord vise à fournir un financement des pertes et préjudices aux pays vulnérables durement touchés par les catastrophes climatiques est salué par l’ONU et les pays en développement dont Haïti. La délégation haïtienne attendait cependant plus de la COP 27.

« La Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (la COP 27) s’est clôturée sur un accord décisif visant à fournir un financement des pertes et préjudices aux pays vulnérables durement touchés par les catastrophes climatiques », s’est réjouie l’ONU dans un article publié sur son site internet. « Ce résultat nous fait avancer », a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif d’ONU Climat, cité dans l’article.

La création d’un fonds spécifique pour les pertes et préjudices, selon l’ONU, marque une avancée importante, la question ayant été ajoutée à l’ordre du jour officiel et adoptée pour la première fois lors de la COP 27. C’est aussi l’avis de Raoul Vital, cadre au ministère de l’Environnement et point focal d’adaptation au changement climatique ayant participé aux négociations aboutissant à cet accord qualifié de décisif. «Les pays en développement ont montré leur force à la COP 27. Ils ont non seulement imposé la question de pertes et dommages dans l’agenda et aussi ont obtenu l’accord, se félicite Raoul Vital. C’est la plus grande réussite de la COP 27.»

Malgré tout, M. Vital estime que les résultats de la COP 27 sont mitigés. «Rien n’a été dit sur l’adaptation qui est notre priorité en Haïti», se désole le directeur de l’Observatoire National de la Qualité de l’Environnement et de la Vulnérabilité (ONQEV) au MDE. Raoul Vital attendait que les pays développés s’engagent à doubler le financement pour l’adaptation d’ici à 2025. «Rien n’a été non plus dit sur le financement de 100 milliards de dollars l’an promis par les pays riches aux pays en développement dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques», affirme Raoul Vital, soulignant qu’aucune décision n’a été prise sur la réduction du gaz à effet de serre par les pays développés.

Pour toutes ces raisons, Raoul Vital croit que la COP 27 n’a pas été une réussite totale. «L’accord sur les pertes et dommages a été adopté pour sauver l’événement», fait-il remarquer. Qui seront les contributeurs de ce fonds ? Qui en seront les bénéficiaires? Quel sera le montant de financement de ce fonds?

«Toutes ces questions sont restées sans réponses dans l’accord», se désole Raoul Vital qui prévoit déjà une COP 28 houleuse. L’événement se tiendra aux Émirats arabes unis en novembre 2023.

Il n’y a pas que Raoul Vital qui questionne l’accord sur les pertes et dommages trouvé à la COP 27. «Ce mécanisme devrait être opérationnel d’ici deux ans, mais des inquiétudes planent dans la mesure où son financement dépend grandement des pays développés, dont les engagements financiers font toujours défaut pour le Fonds en matière d’adaptation. De plus, la Chine, désignée comme un pays en voie de développement (mais qui ne l’est plus, dans les faits), a déjà révélé qu’elle ne contribuera pas au fonds», soulignent des chercheurs à l’Université d’Ottawa, à l’UQAM et à l’Université d’Oxford cités dans un article de https://theconversation.com/. A côté de la Chine, les chercheurs rappellent que les États pétroliers résistent aussi à toute idée de contribution financière.

Si l’ONU estime que la COP 27 a permis aux pays de prendre un ensemble de décisions qui réaffirment leur engagement à limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degré Celsius au-dessus des niveaux préindustriels, les experts ont un avis différent. «La COP 27 s’en est tenue au statu quo, malgré l’urgence, jugent les experts de l’UQAM et de l’Université d’Oxford. Le texte final de la COP 27 se contente de réaffirmer les objectifs de l’Accord de Paris.» Dans cet accord, les gouvernements sont convenus de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5 °C.

Raoul Vital n’a pas dit le contraire. Il estime que les décisions prises à la COP 27 ne sont pas à la hauteur de l’urgence exprimée dans le 6e rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), intitulé “Changements climatiques 2022: impacts, adaptation et vulnérabilité”. Ledit rapport réaffirme l’origine humaine des changements climatiques et fournit une évaluation détaillée des impacts, des risques et de l’adaptation au changement climatique dans les villes, où vit plus de la moitié de la population mondiale. Selon le rapport, les évolutions observées du climat vont se poursuivre, mais elles peuvent encore être contenues si des actions fortes, rapides et durables de réduction des émissions de CO2 sont menées.

A côté des décisions globales de la COP 27, Raoul Vital a précisé que la délégation haïtienne en a profité pour organiser des rencontres bilatérales dans le cadre de son plan d’adaptation. Il informe que des mécanismes comme le fonds vert permettent à des pays comme Haïti de trouver des financements pour des projets d’adaptation. D’après lui, la délégation haïtienne a trouvé des pistes sur lesquelles elle va travailler.

DevHaiti

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