L’investissement en Haïti à l’épreuve de la détérioration de la crise sécuritaire
La 13e édition du rendez-vous annuel de la Finance, axée sur le thème «Financer l’Éco 2 Développement: l’Économie et l’Écologie», s’est tenue du 17 au 19 avril 2023, en présentiel, à l’hôtel Marriott et en virtuel, sur ProFin.TV, première chaîne haïtienne traitant en continu l’information sur l’économie, la finance, l’entrepreneuriat et l’investissement en Haïti et à l’international. Béatrice Ilias, directrice exécutive de la Chambre de Commerce de l’Ouest et de la Chambre de Commerce d’Haïti (CCIH), et Wilhelm Lemke, président de l’Association des Industries d’Haïti (ADIH), ont notamment pris part au panel «Financer les ODD pour le développement d’Haïti».
Au cours de son intervention, Wilhelm Lemke a fait remarquer que le climat de la vie en général est empoisonné pour toute la population, voire pour le climat des affaires. Selon lui, c’est certainement, la priorité des priorités, la situation d’insécurité qui sévit en Haïti. «Nous souhaitons donner quand même un peu d’espoir. Il faut regarder le moyen et le long terme et les accomplissements positifs du passé qui augurent de bonnes opportunités pour notre pays», avance-t-il affirmant qu’étonnamment il y a des investisseurs potentiels – surtout de l’étranger, de l’Asie même – qui sont en attente de faire leur entrée en Haïti. «Ils savent que cette vague infernale doit passer. La paix doit revenir dans notre pays. La qualité de vie doit revenir. Ils sont prêts à venir investir», dit-il faisant l’éloge de l’importance de la proximité géographique d’Haïti avec le grand marché nord-américain.
Nous offrons des avantages comparatifs extrêmement intéressants par rapport quasiment à tous les pays de la planète, par exemple avec la loi HOPE/HELP qui est unique pour le vestimentaire, insiste-t-il. «Nous sommes le seul pays à avoir cet avantage pour rentrer sans droit de douane sur le marché américain pour la plupart — un bon nombre de catégories de vêtements», rappelle-t-il, soutenant que dans la zone des Amériques, Haïti est très bien positionné pour tirer avantage grâce notamment à la qualité de ses ressources humaines. «Le jour viendra où nous pourrons regagner notre place en termes de centre de production pour l’exportation», croit-il.
Selon lui, malgré les difficultés des années précédentes et l’enfer que nous vivons aujourd’hui, des investisseurs parviennent à tenir. «Pour combien de temps est-ce qu’ils pourront tenir encore, ça, on a des doutes là-dessus. Mais, gardons le courage, traversons, identifions nos avantages comparatifs. Les investisseurs sont des preneurs de risque, mais agissons vite sur la question d’insécurité et au bénéfice de tous surtout les plus vulnérables qui eux vivent cet enfer depuis des années», explique-t-il.
Sur le papier, selon lui, nous avons des avantages.
«Mais nous sommes notre propre ennemi avec nos troubles internes — incessants et que personne n’arrive à comprendre ou à tirer une logique de ce qui se passe», dit-il, ne cessant de souligner qu’Haïti offre des avantages que n’offre aucun autre pays au monde. Il croit qu’il est important de donner des garanties, d’envoyer des signaux que plus jamais — nous n’allons revivre ce que nous vivons en Haïti depuis des années récentes. «Nous sommes bien positionnés sur l’avenir. Nos efforts de plaidoyer se poursuivent à Washington et ailleurs», confie-t-il lors de son intervention.
Des collègues rencontrés à Doha — des Africains — disent avoir passé par là et sont en train de se remettre sur pied. «Ils commencent à récolter les bénéfices des investissements locaux et étrangers. Ils nous encouragent à tenir bon. Le jour d’Haïti arrivera bientôt. Ou du moins, nous y travaillons là-dessus — localement et internationalement», croit-il, se plaignant qu’il est difficile de circuler dans le pays avec tous ces gangs armés qui empoisonnent la vie de la population. Ceci doit s’arrêter.
«In fine, tout le monde gagnera lorsque la paix reviendra en Haïti. Tout le monde sans exception y gagnera», raconte le numéro un de l’ADIH qui se veut rassurant. «Nous pouvons rebondir rapidement et nous remettre sur pied».
L’urgence de mettre en place les bases
Pour sa part, Béatrice Ilias, directrice exécutive de la Chambre de Commerce de l’Ouest et de la Chambre de commerce d’Haïti (CCIH), parlant du climat des affaires soutient que cela requiert beaucoup de patience voire de convictions et d’amour pour pouvoir continuer à vivre et à fonctionner en Haïti. «Le climat des affaires actuellement en Haïti est très difficile. Il y a beaucoup de choses à faire», affirme-t-elle sans langue de bois.
Selon elle, il y a certaines choses qu’on doit changer et corriger. Elle a plaidé pour la remise sur pied de certains principes et de certaines lois. Elle prend l’exemple du nouveau Code du travail qui n’a jamais été finalisé. Elle cite aussi des accords commerciaux signés mais pas encore ratifiés. Sans oublier des lois qui attendent d’être passées par devant le Parlement. «Haïti a beaucoup de choses à faire au niveau structurel pour susciter de l’investissement. Ça devient nécessaire. Il faut une base solide. On ne peut pas à chaque fois répéter les mêmes erreurs. On a tendance malheureusement à répéter trop d’erreurs», laisse-t-il savoir.
L’investisseur, qu’il soit local ou international, a besoin à un moment ou à un autre de ce filet de sécurité aussi. La transformation structurelle commence également au niveau de certaines bases que l’on n’a pas. Il est temps de faire quelque chose en ce sens, presse-t-elle, plaidant pour la mise en place d’équipes travaillant sur ces problèmes de base récurrents.
«Il faut à un moment ou à un autre suivre un plan spécifique de développement socio-économique pour ce pays. Un plan adapté, il en a eu. Il a eu des plans socio-économiques rédigés qui sont très valables et très adaptés pour Haïti», souligne-t-elle, déplorant le fait qu’on n’arrive jamais à réaliser cette transformation structurelle et à mettre les choses en place pour assurer la continuité. «Il faut rassurer les investisseurs», encourage-t-elle.
Francisco Guerreiro qui est économiste du RCO Haïti abonde dans le même sens. Croyant qu’il a des opportunités en vue pour des pays en développe- ment, il insiste sur la nécessité de mettre en place des réformes pour ces types d’opportunités. «Il faut toujours penser aux différentes réformes qu’il faut mettre en place. Pas seulement du Gouvernement — mais aussi, avec le secteur privé et la société — de penser à des réformes concrètes. Il faut que les investisseurs autant que les bailleurs puissent aider à changer la situation», souligne-t-il, estimant que c’est dans ces types d’échanges qu’ils vont arriver à trouver de l’aide pour certains programmes.
«Au niveau des Gouvernements, il y a toujours des réformes qu’il faut mettre en place.» Autour du programme d’actions de Doha, — faisant un rappel sur la 5e conférence. Pour lui, la conférence a permis de mettre les différents acteurs en Haïti ensemble. Il y a eu le secteur privé et la société civile — des ONG, les Nations unies. A Doha, il a eu différentes réunions visant à renforcer ou débuter avec certaines initiatives. «Il y a des choses sur lesquels on a à travailler ensemble», dit-il, appelant pour la mise en place d’actions spécifiques, de création d’emplois.
Programmes d’action en faveur des pays les moins avancés

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