Haïti, pire élève de la région en matière d’insécurité alimentaire

L’insécurité alimentaire demeure l’un des plus grands obstacles auquel est confronté les pays de la région Amérique latine et Caraïbes (ALC). Au mois de février 2023, selon un rapport du Programme alimentaire mondial (PAM), 14.43 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire dans 5 pays de la région. Il s’agit d’Haïti, du Nicaragua, du Guatemala, d’Honduras et de la République dominicaine. Les chocs macroéconomiques, marqués souvent par des taux d’inflation élevés, la sécheresse et les conflits armés sont les principales causes de l’insécurité alimentaire dans la région, selon PAM.
Le traditionnel Rapport Global sur les Crises Alimentaires (GRFC-2022 en anglais) du PAM, publié en mars 2023, met un accent particulier sur la région ALC. La région fait face à de nombreuses crises, particulièrement migratoire, qui ne sont pas sans corrélation avec la situation alimentaire. Selon le rapport, 0.3 million(M) de réfugiés et de migrants en Équateur et 2.9M en Colombie sont confrontés à des problèmes modérés ou graves d’insécurité alimentaire aiguë. Au Nicaragua, c’est 0.2M de personnes qui sont confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë.
Haïti se retrouve avec la plus forte gravité de l’insécurité alimentaire aiguë, à savoir 48% de la population en situation d’IPC phase 3 ou supérieure, contre 46% en 2021. Le nombre de personnes en situation d’urgence alimentaire (IPC phase 4) en Haïti est passé de 1.16M en mars-juin 2021 à 1.81M en septembre-février 2023, représentant 18% de la population.
Au Honduras et au Guatemala, respectivement 26% à 28% de la population résidente était en situation d’IPC phase 3 ou supérieure. En République dominicaine, ce taux est établi à 14%, tandis qu’au Salvador, il se chiffre autour de 13% et au Nicaragua autour de 3%.
Haïti dispose également du plus grand nombre de personnes confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë. Selon le rapport en question, 4.72M de personnes, soit 28% du total de la région LAC, qui font face à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë vivent en Haïti. Le PAM déclare la situation dans les pays à revenu faible comme Haïti très préoccupante. Contrairement aux pays à revenu intermédiaire supérieur, susceptible de pouvoir y répondre, comme la Colombie (réfugiés et migrants), la République dominicaine et San Salvador en proie à trois crises alimentaires majeures dans la région.
Le PAM a aussi fait ressortir dans son rapport les causes des crises alimentaires dans les différents pays de la région. L’agence onusienne assimile les crises alimentaires en 2022-2023 aux chocs économiques dans la région. En Colombie, en République dominicaine, au Salvador, au Guatemala, au Honduras et au Nicaragua, la réduction des opportunités des revenus a érodé le pouvoir d’achat des ménages dans un contexte d’augmentation des défis macroéconomiques. Les ménages à faible revenu qui dépendent du secteur informel ont continué d’être impactés négativement par les effets de la guerre en Ukraine et de la pandémie du COVID-19.
Pour Haïti, selon le PAM, ce sont les conflits et l’insécurité qui sont les principaux moteurs de la crise alimentaire aiguë. L’augmentation de l’instabilité politique, les difficultés économiques et les tensions sociales sont aussi à l’origine de l’intensification des conflits armés. La violence des gangs a atteint des niveaux extrêmement élevés en 2022, en particulier dans les zones urbaines, perturbant les marchés et la circulation des personnes et des biens, entravant ainsi gravement l’activité économique. Cela a entrainé un mauvais approvisionnement du marché et les pénuries de produits essentiels, y compris le carburant. D’où la forte augmentation des prix des denrées alimentaires qui fait d’Haïti l’un des pays avec les plus grands taux d’inflation au monde.
En définitive, ce sont les conditions météorologiques extrêmes qui ont impacté la situation alimentaire dans les pays de la région. En Haïti, des précipitations inférieures à la moyenne dans certains départements céréaliers, conjuguées à une forte augmentation des coûts des intrants agricoles et les pénuries de carburant, ont conduit à une réduction de la production des cultures principales durant les campagnes agricoles. D’autres pays, comme le Honduras a été touché par les ouragans Eta et Lota et la République dominicaine par Fiona, ont vu désaccélérer la reprise de leur secteur agricole en 2022. Cela a aussi affecté négativement les moyens de subsistance locale tout en limitant la disponibilité des aliments dans les zones urbaines.

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