Réduction des risques de désastres : où en est-on en Haïti ?

Haïti se trouve sur la trajectoire des cyclones tropicaux dont l’activité maximale a lieu entre août et novembre. Le cyclone Jeanne, en septembre 2004, a été l’un des plus meurtriers de ces dernières décennies pour Haïti. En 2008, le pays a dû faire face à 4 cyclones successifs. L’ouragan Matthew, survenu en octobre 2016, a décimé le grand sud du pays, causant des dégâts considérables notamment sur l’environnement physique, l’habitat et l’agriculture.
L’année 2015 a été une date charnière pour la réduction des risques de catastrophes dans le monde avec les 3 évènements majeurs qui se sont déroulés pendant cette période (le Cadre Sendai, l’adoption des ODD, et la COP21). La prise en compte de ces risques dans le développement de la région nécessite des solutions basées sur une approche multirisque et intersectorielle, pour la survie de la population et la sauvegarde du minimum vital de l’environnement du pays.
Comme élément indissociable au développement durable, la gestion des risques et des désastres (GRD) jouit de plus en plus de notoriété (théorique) dans les documents stratégiques du gouvernement. Par exemple, le Plan stratégique de développement d’Haïti (PSDH) considère la gestion des risques des désastres comme une de ses cibles transversales pour toutes les activités visant à l’accomplissement des objectifs du plan.
Des avancées significatives ont été réalisées dans le cadre de la réduction des risques de catastrophes et la préparation aux urgences aux niveaux local et national depuis la création du Système National de Gestion du Risque et des Désastres en 1999, et de la Direction de la Protection Civile deux ans plus tôt. Cependant, ces efforts sont fragilisés par la non-existence d’un cadre légal et normatif pour la bonne gouvernance du Système National GRD. Ce qui pose la problématique de la non prise en compte de la systématisation des directives sectorielles qui définissent l’intersectorialité dans les politiques publiques, des approches sectorielles systémiques et la gouvernance du risque au niveau du pays.
En 1997, le gouvernement haïtien a créé au sein du ministère de l’Intérieur et des Collectivités territoriales (MICT), la Direction de la Protection Civile (DPC), chargée de la coordination des actions de réponse aux catastrophes et de la gestion des risques. Dans le même contexte, une certaine évolution du processus politique a été mise en branle pour promouvoir une vision également centrée sur la prévention. Ce qui a conduit à la présentation en 2001 du Plan national de gestion des risques et des désastres (PNGRD). Ce plan a fourni le cadre nécessaire à la création du Système de Gestion des Risques et des Désastres (SNGRD), incluant également la formation du Secrétariat Permanent de Gestion des Risques et des Désastres (SPGRD) comme instance de coordination intersectorielle.
Cependant, l’augmentation exponentielle des vulnérabilités et l’exposition d’Haïti face aux aléas dus à de multiples facteurs, est disproportionnelle aux progrès réalisés sur le plan institutionnel et dogmatique pour la GRD au sein du Système National. Aujourd’hui une réalité s’impose aux praticiens et intervenants : redéfinir des politiques publiques prenant en compte les nouveaux paramètres comme le changement climatique, une meilleure compréhension de l’aggravation des risques en raison de l’augmentation des vulnérabilités, et promouvoir des actions différenciées et intégrées visant la réduction des risques et la gestion des désastres, ainsi que le développement des capacités institutionnelles relatives à la GRD de manière sectorielle et intersectorielle. La prise en compte des facteurs socio-anthropologiques pour créer une véritable culture de réduction des risques au sein de la population et son intégration dans la politique, la planification et l’investissement public à tous les niveaux de l’État, demeurent également une nécessité fondamentale.

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