Finance

Des actions de la BRH pour contenir la pandémie

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A l’ouverture du 11e Sommet de la finance, le gouverneur de la Banque de la République d’Haïti (BRH), Jean Baden Dubois, a pris la parole pour présenter une vue d’ensemble et contextuelle du Sommet, faire part des réponses de la BRH et du gouvernement face à la Covid-19, mettre en relief des actions de la Banque centrale pour soutenir la croissance et renforcer l’inclusion financière et des efforts pour renforcer le capital humain. Nous proposons à nos aimables lecteurs un extrait de son discours prononcé le 13 avril 2021.

Pour la deuxième année consécutive, le Sommet international de la finance se tient virtuellement. Comme on le sait, la pandémie de Covid-19 étant encore d’actualité plus d’un an après l’annonce des premiers cas dans le pays, il est nécessaire de continuer à observer les consignes de distanciation sociale afin de ralentir la propagation de ce virus.

En fait, la crise sanitaire planétaire a jeté l’économie mondiale dans une récession dont la sévérité en fait un bouleversement comparable à la Grande dépression des années 1930. Les aéroports du monde sont restés quasi vides une bonne partie de l’année 2020, provoquant une baisse considérable de la mobilité des gens. Au niveau de la Caraïbe, l’activité touristique a chuté de 65,5% en 2020 par rapport à 2019, entraînant une baisse de 60% à 80% des revenus en provenance du secteur et occasionnant de lourdes conséquences dans le monde de l’emploi. Selon le World Travel & Tourism Council (WTTC), l’année dernière la pandémie aurait causé la perte de 174 millions d’emplois dans l’univers des voyages et dans le tourisme. En termes de contribution du tourisme au PIB mondial, on aurait enregistré une perte de 4,7 milliards de dollars, soit une baisse de 53% en 2020 par rapport à l’année précédente.

Toutefois, l’on comprend qu’en dépit de la catastrophe économique découlant de ce contexte de crise sanitaire mondiale, la vie des citoyens reste et demeure la priorité première. C’est ce souci que révèle l’action des décideurs publics partout dans le monde, des premières décisions mettant les appareils productifs nationaux quasiment en veilleuse à la course effrénée en quête d’au moins un vaccin susceptible de mettre rapidement ce virus sous contrôle, en passant par toutes sortes de programmes fiscaux visant à aider les populations à amortir l’impact négatif de la pandémie sur leurs conditions de vie. Le capital humain étant le moteur de la croissance économique par excellence, il fallait le protéger afin d’en sauvegarder la productivité pour l’ère post-pandémie.

Des réponses de la BRH et du gouvernement face à la Covid-19

Du côté haïtien, l’état d’urgence sanitaire une fois déclaré par le gouvernement en mars 2020, la BRH se conforma à la nécessité d’adopter une posture de politique monétaire plus accommodante à l’instar de pratiquement toutes les banques centrales du monde, et ce, en vue de pallier aux effets éventuellement néfastes de la pandémie tant sur les entre- prises que sur les conditions de vie de la population et sur l’économie en général.

Ainsi, en mars 2020,

• les taux d’intérêt directeurs ont été révisés à la baisse à 4%, 6% et 10%, respectivement, sur les bons à maturité de 7, 28 et 91 jours, alors que le taux de mise en pension des bons BRH a été

• De plus, dans le but de rendre moins coûteuse la captation des ressources par les banques commerciales et de favoriser l’octroi des crédits dans le système bancaire, la BRH avait procédé à une diminution des coefficients de réserves obligatoires sur les passifs en gourdes. Pour les banques commerciales et les filiales non bancaires, lesdits coefficients étaient passés de 45% à 40%, alors que celui des banques d’épargne et de logement a été réduit de 5 points de pourcentage pour être fixé à 28,5%.

• Il convient aussi de souligner que d’autres dispositions avaient été prises par la BRH en vue de limiter les conséquences de la pandémie sur le secteur des affaires, sur les consommateurs et sur le système financier.

Ces dispositions concernent, entre autres :

a) L’obligation faite aux institutions financières d’accorder un moratoire à tout débiteur du système qui souhaite en bénéficier, tant pour les prêts accordés aux particuliers que pour ceux octroyés aux entreprises.

b) Le maintien pendant 6 mois de l’annulation des frais de trente-cinq gourdes (HTG 35.00) relatifs aux virements effectués à travers le Système de Paiement Interbancaire Haïtien (SPIH);

c) Le relèvement des limites applicables aux transactions financières en dehors des succursales traditionnelles;

d) Un ensemble d’autres mesures visant la gestion de la liquidité, la préservation de la qualité du portefeuille de crédit et la consolidation des fonds propres des institutions financières face aux risques découlant de cette crise sanitaire.

L’incidence positive de toutes ces mesures sur la stabilité du système financier est palpable. En effet, en dépit de l’exacerbation par la COVID-19 d’une situation déjà difficile, le système bancaire, qui représente 90% du système financier formel, a su contenir le taux des prêts improductifs, stabiliser son assise financière et afficher un niveau de fonds propres réglementaire conforme aux normes en vigueur.

En ce qui a trait au système de paiement, l’accès à la liquidité et l’utilisation des moyens de paiement électronique ont été grandement renforcés. Ainsi, en 2020, les transactions en gourdes réalisées via le Système de Paiement Interbancaire Haïtien (SPIH) ont augmenté de 19% en valeur et de 36% en volume par rapport à 2019.

Si ces mesures entrent principalement dans un plan de gestion des besoins immédiats rendus nécessaires par la crise sanitaire, il convient parallèlement de planifier la reprise post-Covid-19.

De ce fait, la réflexion portant sur l’amélioration des conditions de vie des concitoyens doit demeurer au centre des débats, tout en maintenant un focus à la fois sur le long terme et le renforcement du capital humain.

Des actions de la BRH pour soutenir la croissance et renforcer l’inclusion financière

À côté des actions destinées à soutenir les entreprises et à aider les agents économiques face aux effets néfastes de la pandémie, la Banque Centrale est restée fidèle à sa mission d’appui au processus de croissance économique soutenue, comme en témoignent, à bien des égards, les actions menées l’année dernière. Citons:

• La mise en œuvre de la Stratégie Nationale d’Inclusion Financière, notamment la restitution du Plan National d’Éducation Financière (PNEF) en mai 2020, ou encore le lancement, un mois plus tard, du PNEF. Citons aussi l’organisation les 12 et 13 août 2020 du Forum des Jeunes autour du thème « Leadership en affaires et Éducation financière ». Il s’agit d’autant d’actions parlantes dont les échos vont se propager dans le futur.

• La modernisation du système financier:

a. Projet de modernisation des coopératives d’Epargne et de crédit

b.  Fonds de soutien aux coopératives aux Coopératives d’Epargne et de crédit

a.  Elaboration de proposition de lois et publication de décrets à caractère économique

•  La modernisation de l’écosystème de Politique Monétaire

○ décret sur les maisons de transfert

○ décret sur les intermédiaires de change

○  décret sur les institutions de Microfinance

○ proposition de loi sur l’émission de billets de 2500 G & 5000G

○ proposition de loi sur la Banque Centrale

○  proposition de loi sur le Bureau d’information sur le crédit

a. L’implémentation   d’une   plateforme  de Marché des Changes

b. L’implémentation d’un marché obligataire des bons du trésor

c. L’implémentation des Obligations corporatives

d. Mise en place d’une réglementation pour la titrisation immobilière et d’autres dettes.

e. Elaboration et/ou Publication de Circulaires sur la réglementation du système financier :

1) Circulaire sur le paiement des transferts

2) Circulaires  sur  de  nouvelles  normes prudentielles

3) Circulaires sur les Marchés Financiers

•     La modernisation du système de paiement:

a.   Préparation d’une loi sur les systèmes de paiement

b.   Préparation de lignes directrices pour les Fintech

c.    Implémentation de la Gourde digitale

d.   Implémentation d’un ACH

e.  Implémentation d’un CSD (Central Securities Depository)

•      La mise en place du Cadre de partenariat pour la transformation socioéconomique :

a. Programme de développement immobilier

b.   Fonds de garantie mis en place en collaboration avec le Ministère de l’Économie et des Finances

c.  Implémentation du programme «Cadre National de Financement Agricole, CNFA» avec l’appui financier de l’ambassade de Suisse et l’appui technique du Développe- ment International Desjardins, (DID) en vue de renforcer l’écosystème de Finance- ment Agricole en Haïti.

Toutes ces actions participent de la panoplie d’initiatives entreprises par la BRH en vue d’œuvrer au renforce- ment du capital humain. Et l’institution ne s’est pas arrêtée en si bon chemin.

DevHaiti