Développement durable

 El Niño risque d’affecter l’agriculture d’Haïti

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L’agriculture pèse environ 20 % dans le PIB d’Haïti. A ce titre, elle joue un rôle majeur dans l’économie et la sécurité alimentaire du pays qui dispose d’un territoire de 27 750 km2. Le secteur primaire emploie près de 35 % de la population active du pays. Même si le secteur est en constant déclin, il continue de revêtir une grande importance. Tout ce qui nuit à l’agriculture nuit automatiquement à l’économie et la stabilité d’Haïti. Le phénomène El Niño, revenu au-devant la scène en 2023, pourrait créer des déséquilibres socio-économiques dans le pays au cas où des mesures adéquates ne sont pas prises au plus vite.

L’ex-ministre haïtien de l’Environnement, Joseph Ronald Toussaint, précise qu’avec les changements climatiques, El Niño aura, en Haïti, des répercussions considérables sur la sécurité alimentaire, la gestion de l’eau, la santé (maladies en liaison avec les vagues d’extrêmes chaleurs) et l’environnement.

M. Toussaint explique par ailleurs que le phénomène El Niño est en fait le résultat d’une relation océan-atmosphère au niveau de l’océan Pacifique (Pérou, Équateur, Chili etc..) et qui fait réchauffer la température des eaux de surface de cet océan. Ce réchauffement de la température affecte le régime des vents et des précipitations (pluies, rosée etc.) au niveau global et régional et la Caraïbe, où se situe Haïti, en subit de plein fouet les conséquences.

Même si le phénomène prend naissance dans l’océan Pacifique, les effets sont ressentis dans les pays de la Caraïbe en général et en Haïti en particulier. Mais, «ce sont les pêcheurs du Pérou qui ont donné le nom de « El Niño » à ce phénomène climatique et qui signifie ” Petit Jésus “. Son opposé est La Niña qui désigne des courants de l’océan dont les températures de surface des eaux sont plus fraîches», a confié Joseph Ronald Toussaint.

Après trois années consécutives en période de La Niña, le mois de mai 2023 consacre officiellement le retour d’El Niño. En règle générale, El Niño fait augmenter les températures mondiales l’année qui suit sa formation, ce qui n’augure rien de bon pour 2024 qui devrait être très chaude avec le cocktail des changements climatiques.

Sur la base des modélisations et prévisions de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), il est très probable que les cinq prochaines années seront les plus chaudes de l’histoire. L’OMM nous dit qu’il existe une très grande probabilité de 98% que l’une des cinq prochaines années soit l’année la plus chaude jamais enregistrée, battant ainsi le record de 2016 sous El Niño et considérée comme la plus chaude depuis 1870 ( l’ère pré-industrielle).

Il existe parfois des événements climatiques locaux (courant d’air frais et humide occasionnant des pluies et des inondations) qui peuvent momentanément atténuer les effets de la phase El Niño. Les fortes pluies suivies d’inondations recensées actuellement dans le pays peuvent être très trompeuses. Que l’on ne se méprenne pas. Les années sous El Niño ont pour habitude d’être plus chaudes à l’accoutumée et elles sont souvent accompagnées de fortes et longues épisodes de sécheresse.

A en croire les résultats de la mise à jour de l’ana- lyse projetée du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), les conséquences d’El Niño donnent froid dans le dos. Dans son bulletin de mars, la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (CNSA) indique que 4,9 millions de personnes sont en insécurité alimentaire aigue et nécessitent urgemment une assistance humanitaire pour la période de mars à juin 2023.

L’apparition imminente d’El Niño durant les prochains jours va accentuer les vagues de chaleurs et de sécheresse sur le territoire haïtien. Déjà, le pays est en proie à une sécheresse des plus virulentes au point où l’ex-ministre de l’Environnement, Joseph Ronald Toussaint, appelle les autorités à déclarer certaines zones, les plus touchées comme « zones alimentaires d’urgence ».

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