Forces et faiblesses du Prepoc, selon l’économiste Riphard Serent

L’économiste Riphard Sérent a fait part de ses appréhensions autour de la réussite du Plan de relance économique post-Covid (Prepoc) 2020-2023 au travers d’une prise de position exprimée lors d’une conférence-débat de l’Association haïtienne de journalistes économiques pour le développement durable (AHJEDD).
Pour l’économiste Riphard Serent, l’initiative des autorités haïtiennes de doter le pays d’un plan de relance est à encourager. Selon lui, la meilleure façon de relancer une économie suite à une crise consiste à concevoir un plan de relance économique. « C’est une préoccupation mondiale. C’est le mot d’ordre », a déclaré l’économiste en prenant l’exemple des Etats-Unis et du Rwanda.
L’économiste anticipe sur les risques majeurs auxquels pourrait faire face le Prepoc, à savoir les risques sociopolitiques notamment. Pour lui, la situation d’insécurité et les perspectives électorales pour l’année 2021 sont à prendre en compte. Il confie que l’instabilité politique s’est révélée l’ennemi numéro un de la croissance de 1980 à 2020, période durant laquelle la croissance moyenne de l’économie n’a jamais atteint 2%.
L’autre risque est financier. En ce sens, Riphard Serent prévoit une certaine baisse des recettes fiscales que pourrait entrainer un ralentissement des activités économiques, le décrochage du taux de change, et l’évolution à la hausse du prix du pétrole.
Plus loin, l’économiste pointe du doigt le risque institutionnel tout en mettant l’accent sur la faiblesse des institutions régaliennes, en particulier l’absence de continuité dans la conduite des affaires publiques. Il y aurait un certain risque pour que le Prepoc soit jeté aux oubliettes au terme du mandat du président Jovenel Moïse.
Par ailleurs, l’économiste Riphard Serent émet des réserves quant à trois autres indicateurs importants. Tout d’abord, le taux de croissance de 3% moyenne qu’il juge trop faible par rapport à celui prévu dans le Plan stratégique de développement d’Haïti (PSDH) (5% en moyenne). Ensuite, il doute des prévisions de réduction du taux de pauvreté (59% en 2020 et 55% en 2023, donc le plan de relance prévoit que 440,000 d’Haïtiens sortiront de la pauvreté d’ici-là). En dernier lieu, le coût pour chaque emploi créé (69 000 au total) est jugé trop faible. Avec le Prepoc, un emploi coûte 67 000 dollars ou 5 millions de gourdes.
En somme, Riphard Serent propose la vulgarisation du plan dans les départements pour assurer sa légitimité et l’adhésion des acteurs locaux; la signature d’un protocole d’accord ou un pacte de gouvernance économique entre divers acteurs pour entériner ce plan (devant permettre une certain continuité après la fin du mandat président Jovenel Moïse); et la facilitation des ajustements dans le Plan quelque soit le gouvernement en place, et en fonction de l’évolution de la situation socio-économique.
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