Haïti, le difficile mariage entre la démocratie et l’État de droit
Notre pays a fait choix de la démocratie tel que ce mode de gouvernance est conçu dans l’hémisphère occidental. La constitution du 29 mars 1987 et sa version amendée mettent en place un ensemble d’institutions et dictent des principes qui devaient permettre à Haïti de se hisser parmi les pays démocratiques. Presque 40 ans après, la démocratie haïtienne peine à grandir, voire fleurir. Notre démocratie est même devenue un concept flou au point que certains se montrent nostalgiques de la dictature que la démocratie devait faire oublier.
Tout cela, à cause de la dégradation des conditions de vie, l’incapacité des institutions démocratiques à jouer leur rôle et du refus des hommes et des femmes arrivés/es au pouvoir à partir des principes démocratiques de divorcer d’avec les pratiques dictatoriales. Sans parlement fonctionnel, avec un Premier ministre sans mandat, avec un pouvoir judiciaire incapable de faire respecter la loi, la démocratie haïtienne est sur pause ces dernières années. C’est dans ce contexte que le pays s’apprête à célébrer la Journée internationale de la démocratie le 15 septembre de cette année. Une date qui doit porter les Haïtiens à réfléchir sur ce qu’ils veulent faire de leur pays.
La réponse doit être de continuer à se battre pour instaurer une démocratie véritable dans le pays. Comme certains aiment le dire, la démocratie coûte chère, mais elle reste le meilleur système de gouvernance jusqu’ici. Il est temps que nous montrons au reste du monde que nous ne sommes pas imperméables à la démocratie comme nos détracteurs veulent le faire croire. D’ailleurs, si notre histoire est si tumultueuse c’est parce que les Haïtiens d’hier et d’aujourd’hui ne se découragent jamais de lutter contre le despotisme. La révolution anti-esclavagiste de 1804 comme le mouvement ayant déraciné la dictature des Duvalier en 1986 en sont des exemples. La constitution de 1987 constitue la volonté de la population haïtienne de divorcer d’avec la dictature et ses corollaires.
Les décennies post-86 ont démontré que se donner une constitution avec tous les principes cardinaux ne suffit pas. Il faut se battre et se battre encore pour la faire respecter. Il faut contraindre les hommes et femmes au pouvoir à diriger à partir des principes établis. D’où la nécessité de construire des institutions fortes. Il faut que des hommes et des femmes soient prêts/tes à solidifier le système judiciaire. Les institutions notamment la justice restent la pierre angulaire de la démocratie.
Pourquoi après presque quatre décennies d’expérimentation de la démocratie, Haïti est aujourd’hui à la case de départ? Il y a tellement de paramètres à considérer dans la perspective d’une réponse à cette question, on ne peut qu’émettre des hypothèses. Le parti-pris de nos autorités d’hier et d’aujourd’hui est une bonne piste à explorer. La démocratie ne consiste pas à prôner le respect des principes. Il faut aussi se battre pour arriver à un mariage parfait entre la démocratie et la bonne gouvernance. Il est inconcevable de les dissocier.
Dans ce numéro, nous essayons de présenter les deux concepts à partir d’un langage limpide et des exemples clairs. Nous cherchons à montrer et à démontrer les liens qui existent entre la démocratie et la bonne gouvernance. Nous montrons comment ces deux concepts sont au cœur du travail de certaines institutions auxquelles Haïti appartient. L’idée ce n’est pas de faire une démonstration intellectuelle, mais de provoquer le débat au sein de la population sur notre triste présent. Il est urgent de trouver le modus operandi pour remettre sur pied les institutions démocratiques et rendre responsables les hommes et les femmes qui les dirigeront. Rendre des comptes doit être une obligation pas une option dans une démocratie.
DevHaiti
