Économie

La dette d’Haïti dans le viseur des services du FMI et de la Banque mondiale…

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Dans le cadre de la demande de décaissement au titre de la Facilité de crédit rapide, une analyse de viabilité de la dette d’Haïti préparée par les services du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, entre autres documents, a été publiée.

Les données sur la dette extérieure proviennent de la Banque de la République d’Haïti (BRH) et comprennent la dette envers les créanciers multilatéraux et bilatéraux, y compris les compagnies pétrolières étrangères, ainsi qu’une estimation des passifs éventuels.

«Pour l’instant, le financement de la banque centrale au trésor public ne déclenche pas la notation “en surendettement” pour Haïti. La dette du gouvernement envers la BRH, égale à environ 11,8% du PIB dans l’exercice 2021, n’est pas servie, mais le protocole d’accord de juillet 2022 entre la BRH et le MEF a imputé le paiement des intérêts courus sur les titres de la dette publique non négociables détenus par la BRH; cette reconnaissance a entraîné une augmentation du stock des créances nettes de la BRH sur le gouvernement central à partir du bilan d’octobre 2021. Le protocole d’accord recommande de convertir la plupart de ces créances en titres négociables portant un taux d’intérêt de 7,57 % par an et payables sur une période de cinquante ans avec une période de grâce de dix ans», détaille le document du FMI.

Contexte de la dette

La révision des comptes nationaux en 2020 a nette- ment réduit le ratio dette publique/PIB d’Haïti. Après plusieurs années d’assistance technique, l’Institut haïtien de statistique (IHSI) a publié en octobre 2020 des comptes nationaux refondus et réétalonnés qui ont conduit à une révision à la hausse de 65 % du PIB nominal (EF2019), en partie grâce à l’inclusion du secteur informel. Ces révisions ont fait baisser considérablement les ratios d’endettement. En pourcentage du PIB, la dette publique est tombée à 23,3% du PIB au cours de l’exercice 2020, contre 51,9% prévus dans l’analyse de la viabilité de la dette de 2020 au titre de la facilité de crédit rapide (FCR), et à 28,5 % au cours de l’exercice 2021. Dans le même temps, les ratios de recettes intérieures ont fortement diminué en raison du rebasement, mais aussi d’une baisse réelle de l’administration et du recouvrement des recettes.

En pourcentage du PIB, les recettes intérieures sont tombées à 5,9% au cours de l’exercice 2021, contre 6,2% au cours de l’exercice 2019, et 10,7% selon l’ancienne série du PIB. Les recettes en devises provenant des exportations de biens et de services sont également tombées à 6% du PIB en 2021, contre 11,7% en 2019, ou 18,2% selon l’ancienne série. Comme le montre la détérioration continue des tendances des recettes (et les ratios très bas), la capacité de service de la dette d’Haïti ne s’est pas améliorée.

La dette publique a augmenté depuis l’allègement de la dette reçu après le tremblement de terre de 2010. Haïti a bénéficié d’un allègement de la dette d’environ 1 milliard de dollars de la part des créanciers internationaux après le tremblement de terre de 2010, dont 268 millions de dollars du Fonds au titre du Fonds fiduciaire d’allègement de la dette post-catastrophe (CCRT) et 36 millions de dollars de la Banque mondiale. En conséquence, la dette publique extérieure est passée de 19% du PIB à la fin de l’année 2009 à moins de 9% en 2011 (en utilisant les anciennes séries du PIB). Par la suite, la dette a augmenté régulièrement jusqu’à l’exercice 2020, principalement sous l’effet des décaissements liés à l’accord PetroCaribe avec le Venezuela sur le plan extérieur, et du financement non rémunéré de la BRH sur le plan intérieur. Le gouvernement a obtenu un financement de la part de sociétés non financières nationales (123 millions de dollars) au cours de l’exercice 2018 et a signé un prêt de Taiwan (pour 150 millions de dollars) en janvier 2019, bien que ce dernier ait été décaissé par tranches.

En avril 2020, le Conseil d’administration du FMI a approuvé un décaissement de 111,6 millions de dollars (81,9 millions de DTS) au titre du FCR pour aider à couvrir les besoins liés à la pandémie de COVID-19. Haïti a également bénéficié d’un allège- ment du service de la dette d’un montant de 22,6 millions de dollars (15,21 millions de DTS) en avril 2021 dans le cadre de la CCRT actualisée du Fonds, couvrant le service de la dette envers le FMI arrivant à échéance entre le 14 avril 2020 et le 13 avril 2022. Haïti a également bénéficié d’une allocation de DTS de 224 millions de dollars (157 millions de DTS) en août 2021, la banque centrale en rétrocédant la moitié au gouvernement pour les dépenses d’urgence, y compris celles liées au redressement après le tremblement de terre de 2021.

À la fin de l’exercice 2021, le stock de la dette du secteur public haïtien s’élevait à 5 milliards de dollars (28,5% du PIB). La dette publique extérieure représentait 45,5% de la dette publique totale (12,9% du PIB), dont 80,8% étaient des dettes issues des importations de pétrole financées par le programme Petrocaribe du Venezuela. Le reste était constitué en grande partie de dettes concessionnelles contractées auprès de créanciers multilatéraux, notamment le Fonds international de développement agricole (FIDA) et le FMI. Les informations publiques sur la dette extérieure privée ne sont pas disponibles. La dette publique intérieure a légère- ment diminué, passant de 2,8 milliards de dollars à 2,7 milliards de dollars au cours de l’exercice 2020.

Près de 80% de cette dette était sous forme de financement de la banque centrale au gouvernement. Cette baisse de la dette intérieure en dollars américains résulte en grande partie des effets de valorisation, la gourde s’étant dépréciée de plus de 32% par rapport au dollar au cours de l’exercice 2021. Haïti continue d’avoir des “arriérés techniques” envers le Venezuela d’environ 425,57 millions de dollars, soit environ 2 % du PIB (30 septembre 2021).

L’exercice 2022 a été une autre année difficile. Comme indiqué ci-dessus, la collecte des recettes fiscales est restée particulièrement faible, à 5,4% du PIB, en partie en raison des conditions de sécurité difficiles, tandis que la hausse des prix internationaux du pétrole a contribué à l’expansion du déficit budgétaire, principalement par l’augmentation des subventions aux carburants. Le déficit primaire du SNFP est estimé à 1,9% du PIB pour l’exercice 2022, contre 1,3% prévu dans l’analyse de viabilité de la dette de juillet 2022. Les sources de financement se sont limitées principalement à la banque centrale, le soutien budgétaire extérieur restant relativement faible. Le soutien des donateurs au cours de l’exercice 2022 a été plus faible après les 80 millions de dollars fournis à la fin de l’exercice 2021 à la suite du tremblement de terre d’août. Ainsi, la valeur actu- elle de la dette publique en septembre 2022 est estimée à 23,3% du PIB.

Analyse de la viabilité de la dette du secteur public

La dette publique est viable dans le cadre du scénar- io de base. La dette publique totale devrait s’établir à environ 27% du PIB jusqu’en 2027, pour atteindre 48% au cours de l’exercice 2043. En valeur actuelle, la dette publique culminerait à 42% du PIB au cours de l’exercice 2043, soit quelque 13 points de pourcentage de moins que la valeur de référence correspondante.

Si le ratio de la dette publique reste largement inférieur à sa valeur de référence pour tous les scénarios de simulation de crise, il est très vulnérable aux catastrophes naturelles. Dans le scénario de catastrophe naturelle le plus extrême, la valeur actuelle du ratio de la dette publique au PIB approche à peine 55% sur un horizon plus long (20 ans) après l’année du choc. Néanmoins, il augmente de 60% dans l’après-choc pour atteindre 44% en 2025 (contre 23,3% dans le scénario de référence) avant de diminuer régulièrement.

Source: FMI (rapport pays No 23/80)

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