Gouvernance

La population haïtienne en majorité très insatisfaite de la politique et de la gouvernance

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 L’ingénieur-agronome Nolex Fontil, spécialiste en développement rural, est intervenu pour le compte du Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD) au Sommet régional de la Finance, organisé en décembre 2023 par le Group Croissance au Cap-Haïtien, autour du thème «Les stratégies nationales de développement en Haïti: impacts, perceptions citoyennes et perspectives ODD».

En ce qui concerne l’ODD 1 (pas de pauvreté), le pays a enregistré une très faible amélioration car le taux de personnes vivant sous le seuil de la pauvreté avec 1.9 dollar par jour est passé de 24.5% en 2012 à 23.75% en 2020. Au niveau de l’ODD 2 (faim-zéro), la situation a plutôt tendance à se détériorer. Au niveau de l’ODD 3 (bonne santé), on a enregistré une amélioration au niveau de la mortalité maternelle et infantile mais une amélioration insuffisante par rapport à l’objectif fixé qui est de l’ordre de moins de 70 pour 100 mille naissances. Pour l’ODD 4 (éducation de qualité), une progression a été observée notamment pour les taux d’achèvements. Mais toujours est-il que ces observations en termes d’amélioration sont toujours trop faibles.

«Concrètement, qu’est-ce que cela signifie? Quelle est la perception des citoyens sur les services publics qui sont censé découler de ces plans et stratégies mis en œuvre ? Des services qui sont censés atteindre une population en attente de mieux-être», s’est interrogé Nolex Fontil lors de son intervention.

Quel que soit l’organe de pilotage des politiques publiques considérées, plus de 80% de la population se disent insatisfaits et très insatisfaits de la politique et de la gouvernance. «Nous avons une population très préoccupée et douteuse de la crédibilité des institutions et de la capacité de l’appareil étatique à assurer son bien-être et le contrôle du territoire», a fait remarquer l’intervenant. La corruption est perçue comme un fléau qui gangrène les institutions en mettant en cause à la fois les secteurs public et privé. Elle constitue un frein au développement, un handicap majeur pour la bonne gouvernance dans l’administration. 95% de la population haïtienne sont d’avis que la corruption à un impact négatif sur le développement.

Pour plus de la moitié de la population haïtienne (50.4%), les valeurs culturelles exercent une influence positive sur le développement du pays. Cette opinion est influencée par le sexe et le milieu de résidences des sondés. La violence basée sur le genre est bien présente dans la société selon les opinions de 16.9% de la population. Les femmes sont plus souvent victimes d’agression sexuelle que les hommes. L’appétence pour l’émigration est importante, en particulier pour la catégorie des jeunes qui n’y voient comme étant la seule issue. Environ 35.4% des Haïtiens ont l’intention d’émigrer et de vivre à l’étranger. Les principales raisons explicatives sont en lien avec l’insécurité et ses corollaires, la situation économique défavorable des familles, le chômage.

Pour sortir Haïti de ce marasme du sous-développement, ce ne sont pas les idées qui manquent. D’ailleurs, on a constaté la prolifération des documents de politiques et de stratégies nationales et sectorielle dont la mise en œuvre bute constamment sur divers obstacles : instabilité politique, chocs naturels, manques de ressources et autres défis de gouvernance. Cette population affiche un pessimisme notoire par une amélioration des conditions d’existence à court et moyen terme. L’échappatoire très prisé demeure l’émigration. Cependant, le pays dispose des atouts exploitables comme la diaspora, le patrimoine matériel et immatériel, le potentiel agricole, le piscicole et ressources marines…Le Plan stratégique de développement d’Haïti (PSDH) était ancré dans le contexte OMD (2000-2015) mais il répond à la nécessité de changement à la suite du tremblement de terre de 2010. Depuis, le contexte a considérablement été modifié et les défis aussi.

«Sans vouloir faire l’apologie de l’agenda mondial 2016-2030 des Objectifs de Développement Durable, mais considérant son principe sous-jacent qui est de ne laisser personne de côté, il traduit une vision inclusive et intergénérationnelle du développement. Et si intégré, effectivement et de fort bonne manière dans les plans et les stratégies nationaux, ceux-ci, mis en œuvre au moyen des ressources adéquates peuvent définitivement inverser les tendances précédentes», a reconnu Nolex Fontil.

En 20 ans, sept plans et programmes nationaux ont été adoptés et exécutés en Haïti. 4 décisions majeures des Nations Unies en appui à l’Etat haïtien à travers la MINUSTAH, la MINUJUSTH, le BINUH et aussi, on ne saurait ne pas citer le comité interministériel pour la priorisation et la nationalisation des Objectifs de Développement Durable de l’agenda 2030 des Nations Unies en Haïti. «Nous comprenons que ce ne sont pas les plans qui manquent et pendant plus d’une décennie, Haïti est sous assistance permanente de l’internationale», a souligné M. Fontil.

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