Finance

Le service de la dette, un frein à l’investissement public en Haïti 

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Avec la publication dans le Moniteur du budget rectificatif pour l’exercice 2024-2025, le Gouvernement, en collaboration avec le CPT, a mis le cap sur la relance et le redressement de l’économie, la sécurité, l’organisation des élections parmi les chantiers prioritaires. Même avec une affectation de crédits plus conséquente aux axes prioritaires, la dette d’Haïti reste un défi majeur face au redressement économique annoncé.  

Haïti, depuis plusieurs années, faisait face à un grand dilemme dès qu’il fallait adopter et publier la loi de finances. Compte tenu des obligations internationales et nationales en matière de dette publique, les montants réservés au service de la dette ont toujours représenté une part importante des dépenses prévues par l’État.

De 2020 à 2025, sous l’égide de plusieurs gouvernements qui se sont succédé, la dette interne et externe a constitué un lourd fardeau pour les contribuables haïtiens qui s’attendent toujours à d’importants investissements dans tout ce qui peut améliorer leurs conditions de vie.

Dans le budget publié pour l’année fiscale 2020-2021, l’Etat a consacré 49,2 milliards de gourdes pour le service de la dette alors que l’enveloppe totale était de 254,7 milliards de gourdes. La dette a représenté pour cet exercice près de 20% du budget national à un moment. Dans le même temps, l’État a prévu de dépenser 74,2 milliards de gourdes en termes d’investissement public pour cette année-là, soit environ 30% de ce budget.

Pour l’exercice fiscal 2021-2022, marqué par l’assassinat du président Jovenel Moïse suivi d’une crise sécuritaire sans précédent, le scénario n’a pas changé avec les nouveaux dirigeants de la transition. Toujours avec moins d’investissement dans des secteurs clés, notamment la reconstruction d’infrastructures après le séisme que les départements des Nippes, de la Grand’Anse et du Sud ont connu, ayant occasionné des dégâts importants. Ainsi, un crédit total de 38,5 milliards de gourdes a été prévu en guise de dépenses aux investissements publics sur 210,5 milliards de gourdes. Ce montant ne dépassait pas 18% du budget, laissant peu de place à la mise en œuvre de travaux de reconstruction et d’assistance aux populations concernées.

Certes, il y a certaines variations pour les montants fixés pour amortir la dette du pays ; en grande partie, le constat reste le même : le pourcentage dédié là-bas empêche les gouvernements successifs de se pencher de manière effective sur les investissements à faire pour résoudre des problèmes structurels à travers le pays. À titre d’exemple, pour l’année fiscale 2022-2023, 28,5 milliards de gourdes ont été mobilisés pour le service de la dette pour un budget initial de 267,5 milliards de gourdes. Cette proportion qu’occupe la dette dans les dépenses de l’État, financées par les contribuables, fragilise encore plus la situation dans les zones affectées par les catastrophes naturelles, les régions rurales qui sont devenues encore plus vulnérables avec la crise sécuritaire qui prévaut depuis ces cinq dernières années.  

 De 40,3 milliards en 2023 représentant ainsi près de 30% du budget total, puis 21 milliards pour le projet de loi de finances rectificative 2024-2025. Même avec cette baisse considérable – occasionnée par l’annulation d’une partie de la dette PetroCaribe, soit 1,5 milliards de dollars américains –, le pays peine encore à éponger ses dettes et doit toujours dépenser des milliards de gourdes en dette publique.

Des investissements publics sont nécessaires pour redresser les institutions étatiques afin de fournir de meilleurs services à la population en termes de santé publique, d’éducation, d’énergie, d’infrastructure, de renforcement du système de justice, entre autres. Par conséquent, de nouveaux partenariats doivent être privilégiés en remplacement des emprunts qui plombent davantage une économie qui peine à se relever avec toutes ces crises successives.