Gouvernance

Le Sud risque de disparaître sous le poids de l’insécurité…

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Plusieurs acteurs de la vie nationale ont participé à l’émission spéciale de l’Association nationale des Médias haïtiens (ANMH) du samedi 3 avril 2022 sur la question de l’insécurité généralisée dans le pays.

Pour le journaliste Valéry Numa, nous avons devant nous un triple choix face à la réalité actuelle: faire face (affronter la réalité), nous adapter ou contourner la réalité. Selon lui, nous assistons aujourd’hui à une société partagée entre le deuxième et le troisième choix. D’un côté, nous nous enfermons, nous abandonnons et nous évitons les zones de non droit, et de l’autre, nous fuyons le pays.

Et, comme nous ne pourrons pas tous laisser le pays et ne pourrons pas fuir toute notre vie, nous devons agir. Autrement, nous verrons le Sud disparaître sous le poids de cette situation. Entre le tremble- ment de terre de l’année dernière, l’ouragan Matthew, Martissant qui sépare le sud du reste du pays, la situation est vraiment critique pour la population du Sud. En dépit de tous les potentiels naturels qui pourraient se transformer en des opportunités pour les investisseurs, la région est néanmoins confrontée à un problème d’investissement dû à la situation du pays.

L’insécurité généralisée comme facteur de déséquilibre social

La criminologue Youdeline Cherizar présente l’insécurité généralisée comme un facteur de déséquilibre social. Elle se demande pourquoi malgré les sanctions, les peines liées aux crimes, les gens continuent à en commettre davantage, et dans le cas d’Haïti, les hors-la-loi agissent en toute quiétude. Elle assoit sa réponse à travers les quatre points suivants:

•           La désorganisation sociale et l’impunité généralisée dans tout le pays;

•           Le fait qu’on ait pris à la légère une situation qui s’est aggravée et qui devient incontrôlable;

Un avion incendié par une frange de la population des Cayes, Sud, Haiti

Crédit photo: lenouvellistecom

•           Le désenchantement et la méfiance d’une population que ne croit plus en rien ni en personne. Une population où personne ne fait confiance à personne;

•           Le fait que le crime soit devenu un moyen rapide et sûr pour gagner de l’argent.

Youdeline Cherizar évoque la complicité de l’Etat qui garantit une sorte de sécurité aux criminels.

Plus loin, Mme Marie Rosie Augute Ducénat, dans son intervention, dessine les contours de la situation d’insécurité au regard des droits humains. Elle souligne le fait que l’Etat, depuis quelques années, instaure une politique de bourreaux à travers les gangs armés pour avoir la main mise sur la population et sur le pouvoir politique. Elle fait mention de plus de deux cents gangs recensés sur tout le territoire du pays avec une concentration de 70% dans l’Ouest et près de 60% dans les zones à haut potentiel électoral. Les gangs deviennent de plus en plus arrogants et de plus en plus puissants.

Selon elle, ces gangs sont responsables de plus de 15 massacres dans les quartiers défavorisés où hommes, femmes et enfants sont morts par centaines et laissés à la merci des chiens et des porcs ou brûlés sur des tas d’ordures. Sans oublier plus d’une trentaine de femmes qui sont abusées sexuellement.

Port-au-Prince: un labyrinthe ceinturé par des gangs armés

Du 20 février au 20 mars de cette année, on a alerté environ 10 personnes kidnappées par jour avec des pics arrivant jusqu’à vingt quelquefois. Et de janvier à mars, 13 policiers et trois journalistes sont morts assassinés. Le système judiciaire est défaillant. Pour preuve, environ quatre ans plus tard, aucun procès ne s’est tenu concernant les massacres, et sur 100 personnes incarcérées, 80 sont en attente de jugement. Une situation qui montre combien la question de l’impunité fait rage dans le pays.

DevHaiti

Infodevhaiti

DevHaïti, magazine bimensuel consacré au développement économique, est produit par l’Association Haïtienne de Journalistes Économiques pour le Développement Durable (AHJEDD), et le Group Croissance. Le magazine traite essentiellement des objectifs de développement durable (ODD) et de l’agenda 2030.

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