Économie

L’État embourbé dans le dossier incendiaire du pétrole

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Avec l’assentiment des syndicats de transport, l’État est parvenu à augmenter les prix du carburant sur le marché haïtien. Depuis le vendredi 10 décembre 2021, date de la rentrée en vigueur des nouveaux prix, la subvention ciblée promise par l’Etat haïtien et scellée dans un protocole d’accord ne s’est toujours pas matérialisée. Entre-temps, les chauffeurs ajustent le prix des courses en fonction de la nouvelle hausse, mais les passagers rechignent à payer.

Les membres du gouvernement qui se sont empressés d’annoncer en conférence de presse la hausse des prix du carburant n’ont pas pris le temps de planifier la subvention du transport en commun. Personne ne sait ce qu’il adviendrait dans les rues si l’accord entre les syndicats et le gouvernement n’avait pas été signé, juste la veille (le 9 décembre), quelques heures avant l’affichage des nouveaux prix à la pompe. Pourtant, selon le «protocole d’accord entre l’Etat haïtien et le secteur syndical du transport routier portant sur la subvention ciblée des produits pétroliers (diesel et gazoline) aux véhicules de transport public» , il est clairement écrit que: «L’État haïtien s’engage à émettre des bons, fiches ou cartes pétrolières de subvention à l’Observatoire de surveillance, dans le cadre de l’application du présent protocole d’accord, au profit des bénéficiaires enregistrés dans la base de données de l’Observatoire».

Les prix affichés dès le 10 décembre dans les stations-services sans la disponibilité de la subvention constituent une violation flagrante du protocole d’accord par l’État lui-même qui est censé faire respecter les lois du pays. Les syndicats sont montés au créneau pour dénoncer cette façon d’agir des autorités gouvernementales. Le mal est déjà fait. Les syndicats s’attellent à faire enregistrer véhicules et chauffeurs membres et non-membres de structure syndicale pour bénéficier de la carte pétrolière, avons-nous appris de source syndicale. En plus de la subvention, les signataires s’engagent à créer un Observatoire de Surveillance de l’Application de l’Accord (OSA) composé de cinq représentants de l’État haïtien et de cinq représentants du secteur syndical du transport, signataires du protocole d’accord. L’Observatoire travaille, entre autres, sur la révision du décret créant l’Autorité Nationale du Transport Routier (ANTR). Les modalités de fonctionnement de cet Observatoire feront l’objet de discussions entre les parties.

L’article 8 du protocole en question souligne que l’État haïtien s’engage à créer une Commission pour les activités concernant les produits pétroliers. Elle est composée de neuf membres: trois représentants de l’État haïtien, trois représentants du secteur syndical du transport signataires de l’accord, un représentant de l’Association Nationale des Distributeurs de Produits Pétroliers (ANADIPP) et un représentant de l’Association Nationale des Propriétaires de Station de Service (ANAPROSS). Les modalités de fonctionnement de cette Commission feront l’objet de discussions entre les parties.

La commission pour les activités concernant les produits  pétroliers  a  notamment  pour  mission marché et de veiller à l’application stricte de la loi du 9 mars 1995 traitant des droits d’accises variables sur les produits pétroliers. Les neuf personnalités qui ont paraphé le protocole d’accord du 9 décembre 2021 sont le ministre de l’Economie et des Finances, M. Michel Patrick Boisvert ; le ministre du Commerce et de l’Industrie, M. Ricardin Saint-Jean ; le ministre des Affaires sociales et du Travail M. Pierre Ricot Odney, qui sont les trois représentants de l’Etat haïtien. Les six représentants des syndicats de transport sont: Montès Joseph, Jacques Anderson Desroches, Bénissoit Duclos, Méhu Changeux, Rémy Sanozier et Sonson Dumé.  L’État haïtien, à travers le ministère du Commerce, s’engage à réaliser des contrôles inattendus portant sur la qualité des produits pétroliers mis en vente sur le marché national. Comme si cette prérogative n’était pas du ressort du MCI. Que dire du calibrage des pompes longtemps rêvé par les automobilistes? Pour s’offrir la crédibilité nécessaire, l’Etat, aidé des syndicats, prend des engagements qu’il devrait honorer, si non, les prochaines augmentations, aussi insignifiantes seraient-elles, risqueraient de créer de nouvelles tensions socio-économiques.

DevHaiti

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