ODD5 : Les enjeux de la discrimination contre les femmes pour l’économie mondiale

L’un des plus grands problèmes auxquels fait face l’humanité à l’époque moderne est la discrimination effectuée contre les femmes. S’il est vrai que de grands efforts ont été accomplis depuis la seconde moitié du 20ième siècle pour que les femmes puissent jouir de leurs pleines autonomies, il existe des pays où elles sont discriminées et exclues pour la seule cause de leur sexe. Mettre fin à ce problème serait bénéfique pour le monde sur tous les points: politique, social ou économique. Selon le plus grand cabinet international de consultation en économie dans le monde, en l’occurrence McKinsey Global Institute, l’intégration des femmes peut apporter 12 trillions de dollars US à l’économie mondiale d’ici 2025. Selon ce cabinet américain, en 2018, 40% des pays à travers le monde ont un haut niveau d’inégalité de genre très élevé. Ce constat est valable tant pour les pays développés que pour les pays en développement. Intégrer les femmes aura des impacts positifs sur la compétitivité et l’emploi, car en négligeant l’apport de la force de travail dont elles représentent, certains pays font face à d’énormes manques à gagner. C’est pourquoi depuis 2000, le PNUD de concert avec d’autres partenaires des Nations-Unies et le reste de la communauté internationale, ont placé l’égalité des sexes comme l’un des objectifs à atteindre d’ici 2030, pour un monde plus équitable et productif.
Inégalités de genre comme problème mondial
Aujourd’hui, les femmes comptent pour la moitié de la population mondiale mais elle contribue seulement à 37% de son PIB (ONU, 2019). Cela traduit le fait qu’elles n’ont pas, partout dans le monde, le même droit et ne jouissent pas des mêmes opportunités que les hommes. Sept cent vingt-trois (723) millions de femmes dans le monde, sont victimes des intimidations venant de leurs partenaires, ces comportements conduisent souvent à des cas de bastonnade ou de meurtres. L’ONU-Femme, un organisme des Nations-Unies spécialisé dans la promotion des droits des femmes à travers le monde, fait mention que toujours en 2019, 45 pays ne disposent d’aucune loi protégeant les femmes contre la violence conjugale, 49 pays sont dans la même situation pour ce qui concerne la violence domestique et 39 pays empêchent les filles de jouir de droits d’héritage au profit des fils. A travers le monde, toujours selon l’ONU-femme, 20% des femmes de moins de 50 ans et des filles ont subi des violences physiques et/ou sexuelles effectuées par un partenaire intime. Chaque année, les pratiques délétères telles que le mariage d’enfant, privent de leur enfance 15 millions de filles de moins de 18 ans.
Les femmes assument ainsi 2.6 fois plus de tâches familiales et de travaux domestiques non rémunérés que les hommes. Cette situation les met dans de grandes difficultés à contribuer à la création de plus de valeurs dans les sociétés, donc d’être mieux rémunérés pour jouir le droit de leur autonomie financière. Au niveau de la politique par exemple, bien que davantage de femmes aient accédé à des postes politiques ces dernières années, notamment grâce à des quotas spéciaux de 30% adoptés par plusieurs pays, elles n’occupent encore aujourd’hui que 23.7% des sièges dans les parlements. La situation n’est guère moins meilleure dans le secteur privé, où les femmes occupent moins d’un tiers (1/3) des postes de haute direction et de cadres intermédiaires à travers le monde. (ONU-femme 2019)
Genre et éducation à travers le monde
L’un des aspects suivant lesquels nous pouvons constater les inégalités de genre à travers le monde est l’éducation. Selon l’Unesco, jusqu’en 2018, les filles risquent plus que les garçons de ne jamais fréquenter l’école. En effet, plus de la moitié des enfants non scolarisés sont des filles, le monde regorge de 31 millions de filles qui ne sont pas encore scolarisées en 2018. Moins de 40% des pays ont atteint la parité filles-garçons dans l’éducation et 39% des pays affichent des proportions de filles et de garçons dans l’enseignement secondaire. Les femmes sont sous-représentées dans les disciplines scientifiques car seulement 29% des chercheurs sont des femmes. Elles sont généralement freinées par des obstacles culturels et sociaux dans l’obtention de fonctions de leadership.
En 2018 l’UNESCO a établi que parmi 76 millions de jeunes femmes analphabètes, 54 millions vivent dans seulement 9 pays. Malgré qu’au niveau mon- dial les inégalités de genre notamment dans le domaine de l’éducation ont baissé, des efforts restent à faire pour donner une éducation sans discrimination afin que tout le monde puisse avoir la même chance de réussir indépendamment de leur sexe.
Focus sur Haïti
En Haïti, les femmes font face à de grands problèmes tels que la violence, l’éducation, l’emploi, la santé et le manque de représentation dans les institutions. Selon le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP), la violence sexiste affecte au moins une femme sur quatre (1/4) en Haïti. Généralement, les femmes reçoivent des salaires inférieurs par rapport à ceux des hommes dans le pays. Le pourcentage de femmes qui travaille dans le secteur formel est de 30%, cette situation fait que la prévalence de la pauvreté est plus élevée chez les femmes que chez les hommes, l’informel étant un secteur vulnérable et sans protection sociale.
Selon l’EMMUS VI, 29% des femmes âgées de 15-49 ans ont subi des actes de violence sexuelle en Haïti. Cette proportion est même très élevée chez les femmes non-célibataires où elle se table à 45% : ces cas de violences sont généralement perpétrés par un mari ou un partenaire. La situation est très interpellatrice quand nous considérons le cas des femmes mariées : 34% ont avoué en 2018 avoir subi toutes formes de violences, qu’elles soient physiques, sexuelles ou émotionnelles.
Il faut aussi retenir que les cas de violences conjugales sont plus remarquables chez les femmes dont le niveau socio-économique est moins élevé. A mesure qu’une femme est moins avancée dans ses études, elle est plus exposée aux cas de violences. En effet, l’EMMUS-IV montre que 38% des femmes ayant le niveau primaire ont subi des scènes de violence alors que ce taux est de 7% chez les femmes ayant atteint un niveau supérieur.
Femme et éducation en Haïti
Au niveau de l’éducation, le pays a atteint la parité filles-garçons au niveau de l’enseignement primaire et secondaire depuis l’an 2000. Au niveau secondaire, selon l’EMMUS IV et le FNUAP, la scolarisation des filles dépasse même celle des garçons. L’EM- MUS VI a établi que plus de filles que de garçons vont désormais à l’école en Haïti. Toutefois, l’inégalité s’installe en ce qui concerne les personnes ayant atteint des études supérieures, car seulement 6.1% des femmes y parviennent, tandis que cette proportion est de 11.8% pour les hommes. Il est aussi possible d’observer les disparités entre femmes vivant dans les milieux urbains et celles qui vivent au niveau rural. En effet, selon l’EMMUS-IV, 31% des femmes en milieu rural n’ont aucun niveau d’instruction, contre 13% en milieu urbain en Haïti.
Femme et politique en Haïti
Dans le cas de la représentation au niveau des institutions ou organisations politiques, les inégalités de genre sont évidentes en Haïti. Alors que la constitution requiert un quota de 30% de femmes dans les institutions étatiques, les femmes ne parviennent toujours pas à jouir d’une bonne représentation dans les sphères de pouvoir et de décision. Si nous considérons le parlement haïtien par exemple, la représentation des femmes reste toujours en 2019, moins de 3%, elle est en baisse par rapport à 9% en 2003. Les femmes ne sont quasiment pas présentes au niveau des pouvoirs municipaux et dans d’autres fonctions publiques du pays. Beaucoup d’efforts restent à faire pour atteindre une situation de parité entre femmes et hommes au niveau des pouvoirs publics haïtiens.
Situation régionale
Au niveau de la Caraïbe, le problème de l’inégalité de genre reste persistant malgré des efforts accomplis ces dernières années. Selon la Banque mondiale, 94% des filles au niveau de la région sont scolarisées, ce qui est une note exceptionnelle par rapport à la situation d’une région comme l’Afrique Subsaharienne où ce taux est de 77%. Dans la région Amérique Latine caraïbes, la participation de la main-d’œuvre féminine a connu une augmentation de 33% pour la période 1990 et 2014. Cette augmentation a eu des impacts positifs sur la pauvreté dans la région, car quand les femmes travaillent, il est généralement admis que cela constitue un plus grand catalyseur pour améliorer la situation socio-économique des ménages.
La région a le deuxième plus grand taux de femme entrepreneure dans le monde: 40% des entreprises ont des femmes comme actionnaires. Ce taux est plus prononcé dans des pays comme Saint-Vincent et les Grenadines et la Grenade. Tout près d’Haïti, en Jamaïque, 78% des femmes ont accès à une institution formelle, ce taux est de 14% en 2016 selon les statistiques de Global Findex. Malgré que la région fait face au problème d’inégalité de genre, il est généralement reconnu comme l’une des régions du monde ou la frontière entre femme et homme se rétrécit le plus, car ses performances sont souvent supérieures à la moyenne mondiale.
Au point de vue des institutions politiques et des postes de leadership, Haïti est en queue parmi les autres pays de la région. Les femmes occupent davantage plus de postes politiques notamment au niveau des parlements dans la zone, mais en Haïti, c’est le contraire. Les femmes haïtiennes sont quasi- ment absentes au niveau du parlement, le minimum de 30% réclamé par notre constitution n’est jamais atteint.
DevHaiti